Sur la route menant à la maison

- une compatriote je vois.

Fera remarquer plaidement le scribe avant de laisser Carmia passer sans difficulté, après s'être fait délester la modique somme de 50 florins. 50 florins pour parcourir une distance qu'elle aurait sans doute passer des mois à parcourir à pieds, sans les aléas nombreux de ce genre de voyage. Il restait maintenant à savoir où allait donc t'elle se rendre ?

Lorsqu'elle parviendra à Maetch, elle se dit qu'elle allait sans doute prendre des congés, de longues vacances qui lui permettront de se remettre de cette épopée à la fois psychologiquement mais surtout physiquement. Ses jambes, si sveltes alors, étaient dorénavant cotonneuses et flasques, comme celles d'un enfant commençant tout juste à marcher. Mais malgré cela, la sorceleuse se sentait plus légère que d'accoutumée, car le poids et la menace qui pesaient sur ses épaules s'étaient envolés ! Lorsqu'elle foulera de nouveau le sol de sa bourgade qu'elle croyait avoir perdu de vue pour toujours, la Pianienne eût un petit rictus sincère, et une envie folle de revoir son père. Sans même prendre de réfléchir à quoique ce soit d'autres, elle se faufilera en direction de sa maison d'enfance, impatiente de conter sa vengeance à son géniteur, le tout parsemé de réussite. Lorsqu'elle sera arrivée chez son paternel, elle ouvrira sans toquer la porte, et s'exclamera :

- " P'pa ? Bonne nouvelle ! "

Le papa en question était étalé sur son comptoir, l'air morose. En apercevant la chaire de son sang arriver, un sourire inhabituel s'esquissera sur son visage alors qu'il se redressera maladroitement, manquant de tomber au sol. Il titubera maladroitement vers Carmia avant de l'accueillir d'une grande accolade :

- Carmia ! Tu es revenu ! J'ai eu si peur. Jte jure, j'ai cru... Carmia....

Balbutiera le vieil homme en serrant fort sa seule et unique fille contre lui,  lui coupant le souffle. L'intérieur de la forge était toujours morose, mais le matériel semblait dorénavant ranger et un effort avait été fait pour enlever une partie de la poussière.  Ce qui semblait autrefois à un mosolé était également un peu plus lumineux et vivant, mais l'odeur de bierre que pouvait discerner Carmia grâce à ses sens aiguisés ne trompait pas Carmia, Daltar aurait surement encore besoin de temps.

Comme quoi, les craintes abruptes de son père étaient infondées, et même erronées ; la Pianienne ne risquait dans la mesure du possible rien. Pour preuve, une horde d'assassins et une ribambelle de chiens n'avaient sur venir à bout de leur chasse. Maintenant qu'elle en était bien loin, elle pouvait en rire, en jubiler, elle le méritait bien. Acceptant toutefois à contrecoeur l'accolade de Daltar, ses bras resteront ballants, le long de son coeur, mains son sourire demeura :

- " J'l'ai tué, celui qui a tué maman, j'l'ai tué lui et sa famille pour que rien ne menace toi, moi et Phobos à l'avenir.. "

Le visage de Daltar se refroidit quelque peu devant l'annonce de Carmia alors qu'il libérait la jeune fille de son étreinte, un masque de confusion inscrit sur son visage. Il répondra alors d'un air hésitant, reflettant le conflit qui devait faire rage en lui :

- Je... Tu l'as vraiment fait ? Je, je suis content que ces pourritures soient mortes mais... Enfin oublie ça, ce qui est fait est fait c'est mieux ainsi.

Il se mura quelques secondes dans le silence, regardant sa fille, celle qu'il aimait tant, mais qu'il devait reconnaître ne plus si bien connaître. Etait-ce de cette fille dont-il avait rêvé quand il l'avait conçu avec sa mère ? Une fille qui soit capable de tuer un homme et d'en tirer du plaisir, aussi malfaisant soit il, une fille qui ressemblait par certains aspects bien plus à un homme que son frère. L'on racontait que les sorceleurs avaient été purgés d'une partie de leur émotions en grandissait, dans quelles racines ce mythe avait puisé sa source et jusqu'où était il vrai. Il ne préférait pas y penser, pas maintenant. Il secouera la tête avec regret avant de reprendre toujours aussi incertains :

- Carmia, j'ai honte de te demander ça mais, est ce que tu as pu récupérer ce que.... le voleur nous avait pris... en partant.

Demandera le père de Carmia avec une certaine honte devant les prétentions bassement matérielles de sa question à un moment aussi important que celui-ci.

La réticence que montrait son père rendra la jeune femme sceptique ; avait-elle dit ou fait quelque chose qu'il ne fallait pas ? On lui avait dans le bar de cette même ville incité à faire trépasser ce freluqué, et maintenant on venait l'en blâmer ? Non, cela n'était pas possible, ce qui avait dû perturber Daltar, c'est l'évocation de Phobos, la Pianienne se souvenait à peine qu'il était en froid. Elle pensa alors ingénument que le froid qui s'était installé venait de là.

- " Oui j'l'ai fais, c'était plus facile que prévu "

Le paternel avait peut-être des suspicions sur la perte d'émotivité de la part de sa cadette, mais peut-être qu'au contraire, cette hécatombe avait été orchestré par le prisme d'un trop plein d'émotions ? Un cataclysme de haine s'étant traduit par la seule solution qu'on leur avait enseigné à Kaer Morhen ; la violence. Le climat austère y avait contribué, on leur avait répété que les humains pouvaient les voir comme des machines à tuer, dépourvues d'émotions. Et même si la plupart n'y croyaient pas, ils finissaient inconsciemment par s'accoutumer à cette vision. La sorceleuse, elle, s'était vue privée à cause de son caractère difficile d'empathie et de tendresse, elle avait fini par croire que cela n'existait plus, et que seule la vision pessimiste et impulsive demeuraient choisissables pour elle.

- " Heuuu... Non, de quoi ? "

A vrai dire, devant partir en trombe après avoir abattu son épée sur la carcasse de Florirck, Carmia n'avait guère pensé à le dépouiller. Une habitude qu'elle n'avait pas attrapé contrairement à beaucoup de ses camarades de promo.

C'était plus facile que prévu, une phrase d'une telle désinvolture, comme si il s'agissait de trancher un gigot, ou de vider une volaille ce qu'avait été cette expérience pour Carmia, un geste banale qui rentrera dans sa routine de sorceleuse. Daltar fermera les yeux quelques instants, déboussolé par le chaos d'émotions qui s'agitait dans sa vieille carcasse battue par le temps et la tristesse des évènements qui avaient marqués sa vie. Il prendra alors la parole d'une voix douce, presque soulagée. Cet objet était après tout finalement plus une bénédiction qu'une malédiction, c'était bel et bien lui qui avait tué sa femme, le voleur aurait il effectué son cambriolage si il n'avait pas eu vent de son trésor ? Comment diable avait il put seulement apprendre son existence :

- Ce n'est rien... c'est mieux ainsi... Il s'agit d'une relique familiale, une dague enchantée... d'une grande valeur. mais notre famille n'a plus à supporter ce poids, ce genre de richesse ne fait qu'attirer les convoitise, et vois donc où ces mêmes convoitises nous mènent.

C'est en écoutant son père que la mémoire lui revint, ou du moins que sa conscience dirigera la Pianienne vers un élément précis de son passé, qu'elle avait occulté il y a peu. En se concentrant de plus bel dessus, la sorceleuse haussera les yeux au ciel, semblant dépitée mais pas vraiment étonnée :

- " Ah je vois, j'suis conne j'avais complétement oublié... J'ai dû m'tailler en vitesse des lieux sinon ils allaient m'faire la peau, mais avant j'ai vu Phob' prendre un truc sur le cadavre du mec, Florirck là. Avec le Soleil j'voyais rien mais j'crois que c'est ça. Il s'fout encore dans la merde il est pire qu'un gosse.. "

Un air dépité se dessinera sur le visage du vieil homme alors que Carmia évoquait une fois de plus le nom de son frère, révélant la fumisterie dans toute sa splendeur. Son frère l'avait eut dans les grandes largeurs, comme lors de son enfance où il arrivait systématiquement à lui faire porter le chapeau pour la moindre de ses bêtises. Mais les gens changent, et il y avait fort à parier pour qu'un jour les deux frères et soeurs se recroisent, après tout, le monde était bien petit. Il déclarera sobrement :

- Je vois... ce sale gosse a finalement eut son héritage... il serait passé sur mon corps au besoin... Enfin, cette histoire est terminée maintenant. Que comptes tu faire Carmia ?

Lorsque son père faisait passer ses discours archaïques sur la haine ou le dégout qu'il pouvait éprouver à l'encontre de son frère, Carmia se contentait de se détacher de ceux-ci. Elle rêvassait à autre chose, et rétorquait toujours à ce qui était dit.

- " Boarf... T'inquiètes, il viendra sûrement t'la rendre. Et au pire j'lui enverrai une lettre pour qu'il te la ramène "

Ensuite, pour l'interrogation que se faisait Daltar, Carmia eût une incertitude naissant dans son cerveau ; qu'allait-elle faire ? Maintenant qu'elle était libérée de sa vengeance et en sécurité, qu'allait-elle faire si plus rien ne la motivait ? Allait-elle passer sa vie comme tous ses comparses, à trucider du monstres dans chaque petite bourgade qu'ils visitaient ?

- " Bah.. J'sais pas "

- Tu es étonnement naïve Carmia.

Répondra le vieil homme avec l'esquisse d'un sourire. Il savait qu'il avait raison, mais ces dernières traces de candeurs qu'entretenaient Carmia lui faisait chaud au coeur. Il se redressera légèrement avant de continuer :

- Tu voudras rester un petit bout de temps ? Si tu le veux je pourrais t'apprendre un peu du métier. je suis sure que tu serais une bonne forgeronne.

Elle haussera les épaules. Pour Carmia, il ne s'agissait pas de candeur, mais plutôt d'une preuve de l'alliance qu'ils avaient formé dans cette affaire. On niait toujours les faits qu'elle avançait, la mutante allait montrer que encore une fois, elle allait avoir raison.

- " Tu verras "

Quant à son avenir, la proposition de Daltar tombait à pic. Ne souhaitant plus vagabonder de ville en ville tout de suite, une trève s'imposait dans son quotidien qui était devenu trop mouvementé pour elle, la casanière qu'elle était. Elle ne croirait jamais penser cela, mais la sérénité et stabilité de Kaer Morhen lui manquait.

- " Ouais, ça peut s'faire. Surtout que j'ai besoin d'repos après c'que j'ai du faire ces derniers temps. Et puis ça m'fait plaisir de pouvoir te reparler p'pa "