L'aile droite du château

Le couloir principal de l’aile droite du château était empli de poussière, chacun de leur pas laissant de profondes empruntes dans ce sol qui ne semblait pas avoir été foulé en des millénaires. Cette vue aurait pu être un brin poétique, si l’indicible pression qui habitait le château ne forçait pas les sorceleurs à la vigilance. Laisser de telles empruntes prenait alors une dimension bien plus angoissante, si un monstre venait à les chercher, il n’aurait aucune difficulté à les retrouver.  

Sous la poussière, l’on pouvait parfois trouver des objets parfois brisés, parfois intacts, jonchant le sol, jusqu’à même un squelette de petite taille, le corps étendu au milieu du couloir en positions fœtal, les os des cervicales brisés.

Le couloir principal menait à un large escalier, leur permettant d’accéder au premier étage, ainsi qu'à un second couloir les menant à l’arrière du château. Les salles jouxtant le couloir alternaient entre cabinets privés, salles de réception, et autres salons d’agréments où recevoir les invités de diverses importances suivant les occasions et l’effet recherché. Malgré l’abandon, les pièces les plus richement décorées gardaient une aura de superbe, que ce soit grâce aux bas-reliefs que le temps n’avait réussit à éroder, ou la beauté des mosaïques qui recouvraient leurs sols et leurs plafonds.

Maintenant seul avec Meruem, les deux sorceleurs marchèrent donc dans l'aile droite du château qui se découvrait à leurs yeux au fur et à mesure de leur pas, dévoilant ainsi tout un pan de son histoire à des visiteurs, trop rares en nombre, ayant la chance de la découvrir. Ou bien la malchance: certain secret n'ayant nulle vocation à être découvert, c'est d'ailleurs cette impression que lui donna le squelette qu'ils trouvèrent sur le chemin. Difficile de dire dans cet état qu'est ce qui avait pu le tuer, hormis ses cervicales brisées, de trop nombreuses hypothèses s'offraient à eux, d'autant que c'était un mystère difficilement résoluble ... Ils continuèrent leur marche jusqu'à pouvoir monter un étage au-dessus tout en continuant leur exploration, mais pourtant nulle trace de ce qu'il cherchait du moins de ce qu'ils pensaient chercher. Les spectres viendraient sûrement les déranger si ils tentaient d'accéder à la tour principale, là où ils avaient le plus de chance de trouver le genre d'objet ou d'information leur étant nécessaire, mais peut-être cela valait-il le coup d'essayer ou de réessayer ?

-"Les pièces sont jolies mais je ne sais pas si l'on trouvera ce qu'on cherche à l'intérieur de celle-ci ... peut-être dans le donjon ?"

Meruem ne craignait pas les traces qu'ils laissaient, ils ne se cachaient pas vraiment et s'il y avait des menaces dans ce château, ce n'était probablement pas via des traces de pas qu'elles trouveraient les deux sorceleurs. Meruem s'approcha du squelette et observa justement ces cervicales brisées, à quoi cela ressemblait précisément, à une morsure, à un coup du lapin ?

- Le donjon ? Et l'on cherche quoi précisémment, un couteau ?

-"La dague qu'il y avait sur la peinture, elle doit peut-être encore s'y trouver."

Les spectres avaient l'air d'être les images fantomatiques des anciennes maîtresses des lieux ? Le donjon étant la tour réservée aux seigneurs, il serait ainsi plus facile de dénicher quelque chose leur ayant appartenu ... si ce quelque chose était encore sur place évidemment. En regardant les nombreuses pièces se trouvant sur leur chemin, Kantz vit encore un corbeau, oiseau de malheur, qu'il dévisagea quelques instants jusqu'au moment où il perçut la pièce derrière. L'adolescent s'y dirigea donc lentement puis passa la tête à travers la porte.

- Hmm, cherchons ce...

Il s'arrêta, interrompu par le corbeau. Qu'est-ce que ?...

- Sois prudent.

Il suivit Kantz après avoir posé un long regard sur le corbeau, y cherchant un signe d'intelligence ou d'humanité. Il dégainera son épée en rentrant dans la pièce, rompu aux déconvenues.

Impassible il lisait les vers d'un homme aux milles conquêtes quand le corbeau le ramena vers l'armoire que Kantz ouvrit alors. Dedans, des habits et des bijoux... voilà tout ? Meruem s'était redressé avec quelques pages dans la main droite tout en rengainant son épée présente dans la main gauche.

- C'est la joaillerie qui t'enthousiasme tant, petit oiseau ?

S'adressant au corbeau. Il songea qu'il y avait peut-être autre chose dans l'armoire, peut-être là où frappait le piaf, mais pour l'instant... Meruem prit d'abord le coffret de bijoux, et le brise au sol un peu plus loin. Il observera la réaction du corbeau.

-"Tu penses qu'on peut bouger l'armoire ? Je sais pas ce qu'il a ce corbeau avec mais c'est peut-être derrière ?"

Si Meruem était d'accord, Kantz ira se positionner d'un côté en attendant qu'il se place de l'autre pour la bouger.

- C'était pour être sûr.

Fit-il sans ramasser les bijoux qui devaient valoir un paquet de florins...

- Hm. Meruem jeta un oeil au coffret sur la table de chevet, et les autres dizaines de pages éparpillées, puis revint à Kantz. Essayons.

Il déposera le papier en main sur le lit, puis viendra prêter main forte à son camarade pour bouger cette armoire si cela semblait faisable.

-"Ahem ... il n'est donc pas si idiot que cela ? J'imagine qu'on descend ?"

Proche de l'affirmation, la question restait tout de même en suspens si Meruem voulait faire autre chose.

- Hm.

Il jettera un oeil rapide dans la pièce, y avait-il un quelconque indice montrant à qui la chambre appartenait ? Les habits étaient exclusivement masculins ou mixtes ? Des tableaux portraits, ou quoi que ce soit d'autres que les pages ? Il répondrait à Kantz ensuite.

- Oui, allons-y.

Il s'engouffrera avec Kantz et le corbeau dans le donjon.

Rien n'était visible, cependant bien d'autres choses semblaient se tramer au delà du domaine du visible, alors que Meruem et Kantz continuait à suivre le chemin, passant non loin d'une gigantesque racine au détour d'un rocher, ils pourront soudainement sentir une lourde pression les envelopper,  comme si il venaient de rentrer dans un nouvel environnement, abandonnant l'air vicié par la malédiction pour entrer dans une sorte d'épaisse mélasse qui pourtant n'accentuera pas la sensation de malaise qu'ils avaient put ressentir en s'approchant des lieux maudits. La sensation était moins hostile, mais la présence s'en faisait d'autant plus écrasante, envahissant l'espace d'une manière presque physique. Un rire cristallin, mais pourtant étrangement grave, raisonnera alors dans leur esprit :  

- Venez, Vous êtes sous ma protection.

Déclarera t'elle avant de laisser de nouveau place à un silence complet.

- ...

Kantz pourra voir que les sourcils de Meruem se sont froncés subtilement.

- Et qui êtes-vous ?

Demanda-t-il sans incrédulité en vérité, tandis que son corps se détend pour créer une sérénité de façade. S'il n'était pas particulièrement stressé, Meruem sentait une certaine inquiétude gronder en lui, qu'est-ce que c'était que ça ?... La sensation lui rapella ce soir où Kaer Morhen - la forteresse - avait prit vie (Kantz aussi du coup). Meruem ne continua pas son chemin, pas dans l'immédiat du moins, il se sera arrêté quelques instants, avant de marcher d'un pas assez lent, et surtout prudent.

- ... C'est cette "déesse" qui nous guide on ne sait où, Kantz... C'est curieux...

Il souffla, Kantz pouvait voir que son camarade était en proie à de profondes réflexions.

Vers quoi menait cette porte ? Était-ce une sorte de temple ? Tant d'interrogations, en plus de celles de Meruem, rendant plus austère et forcément plus difficile à supporter le silence des lieux.

-"Vers son "temple" ? "

Du moins si il y avait un temple lui étant consacré.

-"A quoi tu penses ?"