Les dortoirs masculins

Après plusieurs mois passés à laver, nettoyer, récurer, la forteresse de Kaer Morhen était plus belle que jamais. Elle brillait tel un phare en pleine tempête et pouvait désormais accueillir des invités prestigieux sans avoir à rougir. Le réfectoire n'avait rien à envier à la salle de banquet de feu Emhyr var Emreis, bien que la qualité des repas servît y laissait encore à désirer.
Les écuries étaient dignes des pur-sang de Cintra, la salle de bain était à la hauteur des attentes des coquettes et envoûtantes magiciennes. De même le laboratoire des mutations était si impeccable, avec ses senteurs de violettes, que l'épreuve des herbes en devenait presque relaxante.

Cependant il restait une dernière bataille à remporter afin de gagner la guerre, le lieu le plus dégouttant de tout Kaer, voire même de tout l'empire Nilfgaardien, le dortoir des garçons.
D’apparence plutôt austère, la pièce avait le don de réunir à elle seule toutes les ignominies de ses camarades :

Des poils sombres disséminés un peu partout et une odeur de chien mouillé que l'on devait à Alban le chien-garou;
Lucius lui pouvait être autant suivi à l'odeur que par ses traces de pas boueux qui curieusement allaient de son lit jusqu'à celui d'Eadwacer, c'est donc pour cela que ce dernier boitait tel un manchot sodomite.    
Le lit de Salazar était tacheté de jaune, le jeune homme méritant bien son surnom de Sal le pisseux.                                                        
Quant à la literie de Kantz...mieux valait-il garder le silence à ce sujet.

Seuls trois lits étaient dans un état impeccable, tout d'abord celui du petit nouveau Harold, qui n'avait sûrement pas encore eu le temps de le saloper; celui de Poddrick qui dormait dans un lit miniature conforme à sa taille, presque un berceau, et Lynos qui faisait son lit au carré tous les matins.

Le garçon, équipé comme à son habitude, commença par brûler les draps de ses camarades, ils étaient de toute façon irrécupérable. Puis il nettoya la pièce comme il savait si bien le faire, s’arrêtant tantôt pour prendre l'air, tantôt pour vomir dans un sceau.
Il finira, tant bien que mal, à rendre une seconde jeunesse à cette pièce qui ressemblait désormais à un dortoir de caserne, propre et ordonné.

Le jeune rouquin avait appris deux choses grâce à cette sanction : les roux n'avaient pas une odeur si forte que cela finalement, surtout en comparaison de ses camarades, et enfin l'odeur trouver parfaitement sa place dans la panoplie du sorceleur, à coté du glaive en argent.

Son œuvre enfin accompli, Lynos irait chercher Eskel afin de lui demander de lever la sanction qui pesait sur lui. Si ce dernier ne le laissait pas participer aux sorties à Seig Lyn, peut être lui retirerait-il ces heures de ménages qui l’empêchaient de pratiquer la magie autant qu'il le souhaiterait.